[SIMPLE MAN]

X. n'est pas quelqu'un qu'on aime avoir dans sa vie. Le genre pas sortable, pleins de tics bizarres, qui bave même. Le truc rapporté comme ça, posé sur la table. On s'dit qu'il cassera pas trois pattes à ta lampe Starck, il finira bien par s'en aller comme il est venu. X. n'est pas quelqu'un qu'on aime regarder, maigre in the bad way. secoué par une tectonique des plaques viscérale et sèche. Un peu comme s'il avait une râpe à gruyère géante dans le cul. On n'aime pas l'écouter non plus. Il parle de choses étranges, rigole bêtement en te racontant comment il a fait exploser un micro onde, vidéo sur son HTX à l'appui.

X. habite en bas de chez moi. Habillé comme un pouilleux de l'ombre, un cadavre plouc traînant des années de tares vestimentaires voire génétiques. Un style d'accumulation, mêlant le pire de tout ce qui a été ringard depuis les 70's. Il habite en bas de chez moi, sûrement au rez de chaussée un truc du genre, j'ai quelques temps cru qu'il squattait une cave. Du coup, quand il m'a claqué, un matin déjà plombé par le sida de sa journée, que j'avais un sac de fille, j'lai toisé tellement fort que seules ses double foyer ont du m'empêcher de cramer son âme baveuse. Exactement. C'est le genre baveux, qui laisse des traces de sécrétions sur tout ce qu'il touche, voit, renifle, de tout ce qu'il pense. Son existence est une trace de merde liquide sur la face du 15ème, de la terre, de l'univers, puant jusqu'au mur de planque. J'avais un sac de fille et en plus j'étais bon pour me sentir pourri jusqu'à la fin de mes jours.

Un matin. Après m'être vaguement écrasé le crâne contre le bitume, vu des étoiles, un filet de sang sur ma tempe. Après être resté froid, par terre, pensant en boucle à une scène d'hiver quelques années plus tôt. Il est apparu. X., LE X. me tendant un gant aussi usé que mon moral. Son visage s'est mis à faire des pulsations ultrasoniques commandant aux petits hommes verts de la planète cracra un sourire. J'ai cru voir la fin du monde. C'était presque décevant, jusqu'à ce qu'une sonnerie spéciale Hanouka expire de lui. C'était la fin du monde et elle était juive.

Une fois relevé, il a toisé mon crâne pendant quelques secondes. J'ai allumé une clope, il m'a toisé comme si j'avais volé l'horrible badge harry potter qu'il cachait tendrement dans la doublure de sa veste en cuir, sûrement écorché d'une vache qui a du connaître l'inquisition. Il m'a disséqué à chaque inspirations, menaçant chaque filet de fumée sortant, s'imprimant sur mes paupières scellées dans contentement douloureux.

"Tu ne fumes pas j'imagine ?" "Non je-blablablabla-là il part sur une tirade anti tabac et sur ma mort prochaine et douloureuse, me traitant d'idiot au passage ce que j'ai accueilli comme un crotte de chien sur mes lèvres" "Merci, et euh, bonne journée" "Tu vas au taff ? T'es étudiant ? Tu-reblablablabla-réseau électrique-La défense-informatique-Scooter-une sorte d'auto congratulation puérile sur comment il était le seul à rouler en scooter lorsqu'il y a eu trente centimètres de neige quelques semaines plus tôt à Paris" "Ah, ouais. Cool".

Tout ça pour dire que quand, hier soir, accroché en pleurs à son blouson en cuir, un casque suintant la crasse sur la tête, tambourine man en boucle de bout en bout. Frigorifié jusqu'au bout des ongles. Distillant ma maladie aux quatre coins de Paris. Les jambes soudées aux siennes pour éviter les rétroviseurs de toutes voitures normalement constituées. Quand j'ai rigolé en dérapant sur son guidon, que ma semelle a cramé. Qu'au feu, bouteille de vodka en main et morve plein les joues j'ai fait titanic autour de république, qu'il a pilé en pleine circulation pour me dire ferme ton casque enfoiré.  Là J'me suis bêtement dit qu'on était tous des simple men.

Hey! Mr. Tambourine Man, play a song for me,
I'm not sleepy and there is no place I'm going to.
Hey! Mr. Tambourine Man, play a song for me,
In the jingle jangle morning I'll come followin' you.